Les origines de la cité grecque - Homère et son temps by Évelyne Scheid-Tissinier

Les origines de la cité grecque - Homère et son temps by Évelyne Scheid-Tissinier

Auteur:Évelyne Scheid-Tissinier [Évelyne Scheid-Tissinier]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Armand Colin
Publié: 2017-01-15T00:00:00+00:00


2.3 Les hommes de la communauté

• Les obligations

Le genre même de l’épopée qui concentre son intérêt sur le mode de vie et les valeurs de l’aristocratie, permet difficilement d’appréhender la nature des rapports qu’entretiennent ces aristocrates avec l’ensemble du peuple, du dèmos. Ces rapports sont de toute manière fondés sur des différences de condition très marquées par l’inégalité. Confronté à l’obligation de faire une révélation qui va contrarier le roi, le devin Calchas demande le secours d’Achille pour le protéger, lui qui est « un homme de peu », contre la fureur de plus puissant que lui (Il. I, 80). Les plus modestes sont couramment qualifiés de kakoi, un terme qui s’oppose aux qualificatifs d’aristoi ou d’esthloi, qui désignent les nobles. Poséidon, rendu furieux par les décisions de Zeus, s’insurge contre lui et rappelle qu’il n’est pas un kakos qu’on peut intimider (Il. XV, 196). Une opposition que l’on retrouve de la même manière dans les poèmes de Solon, lorsque le législateur évoque les mesures destinées aussi bien aux gens de bien, agathoi, qu’aux gens de peu, kakoi, c’est-à-dire aux deux catégories sociales qui étaient celles de l’Athènes de l’époque archaïque (Aristote, Constitution d’Athènes, XII, 3-4).

Leur statut autorise les nobles à imposer au peuple, au dèmos, des obligations matérielles. Il est ainsi dit à propos des sept villes qui font partie des présents de réparation qu’Agamemnon souhaite offrir à Achille pour le persuader de retourner au combat, qu’elles sont habitées par des hommes qui ont de riches troupeaux de moutons et de bœufs. Ces hommes « l’honoreront d’offrandes (dôtinai), comme un dieu, et sous son sceptre lui paieront des droits (teleousi themistas), fructueux » (Il. IX, 154-155). Deux choses sont évoquées : d’abord les offrandes, avec l’emploi d’un terme qui évoque le don et qui renvoie aux présents que les hommes sont incités à offrir aux dieux pour obtenir leur protection. On pense aux propos que Sarpédon adresse à Glaucos, sur les privilèges que leurs exploits de guerriers leur valent en Lycie où ils sont regardés comme des dieux (supra, 2, 2, 1.). Il évoque ce faisant l’obligation d’une sorte de réciprocité qui contraindrait la communauté à respecter à l’égard de ses nobles un certain nombre de devoirs et de prérogatives. Les autres redevances désignées par des termes plus techniques font penser à des taxes plus réglementées. Or, il est difficile de croire qu’il ait pu exister dans le monde grec des IXe-VIIIe siècles, un système de contributions aussi organisé que semble l’être le prélèvement de ces themistas. Certains historiens ont suggéré qu’il pouvait s’agir là d’une des rares réminiscences de l’époque mycénienne où il existait effectivement un système extrêmement complexe d’impôts qui convergeaient vers le palais royal.

Plus généralement, les ponctions effectuées sur l’ensemble du peuple apparaissent liées à des nécessités ponctuelles, comme celles que véhicule la guerre. Hector mentionne ainsi l’importance de l’effort de guerre qu’il est contraint d’imposer aux Troyens qui doivent faire des dons et fournir des vivres de toute sorte probablement destinés à entretenir son armée de défense (Il.



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